27 janvier 2007

Chapitre 13 : Verre brisé, vue retrouvée


Dans le bar, nous retrouvons mes amis dans le fond. La présentation est rapide. Elle commande un Gin fizz. Elle ne le trouve pas bon. Nous le gouttons, il parait normal. Elle le fait changer et boit le second qui a toujours un goût dérangeant. La discussion est assez sarcastique, j’ai peur de ce qui est en train de se passer. Je sens que mes camarades on l’esprit moqueur. Je le sens dans leur regard, dans leur sourire. Par chance, les propos sont mesurés.
Nous poursuivons notre soirée dans une petite pizzeria. La pièce est petite. La lumière rend le tout très intimiste. Nous rigolons bien. Elle peut être un peu moins. Elle n’a pas les mêmes références. La fin du repas approche. Les couverts sont croisés dans les assiettes. Le drame. Elle se permet de les décroiser. Ils insistent et les remettent dans cette position. Elle est superstitieuse. Il ne faut pas croiser les couverts. Une idée stupide. C’est la prise de tête. Ils s’amusent bien. Elle devient folle. Je les supplie du regard d’arrêter. C’est moi qui vais trinquer après. Par chance, le serveur arrive rapidement enlever les assiettes. Tout le prendra des desserts. Tout devrait rouler maintenant. Ils trouvent le moyen de croiser les cuillères dans les coupoles. Le pire c’est que ça m’amuse aussi de la faire enrager. Je ne devrais pas. Il faut que je pense aux conséquences. Finalement nous quittons le restaurant pour retourner dans un bar. Un bar différent de l’apéritif.
Elle recommande un Gin fizz. Le suspens est à son comble. Le verdict sera fatal. Mais fatal pour qui. Le résultat arrive rapidement. Il n’est pas bon non plus celui là. Je suis accablé. En fait, elle ne doit pas aimer le Gin fizz. Pourquoi s’acharne-t-elle à en prendre. Les moqueries ne peuvent plus être retenues. Je ne sais pas si elle saisit les attaques. Elle ne semble pas ciller. C’est dramatique. Elle se fait lyncher. Je ne fais rien pour la sauver. Elle ne comprend je pense ce qui se passe. Le combat n’est pas frontal. Elle est fatiguée, elle veut rentrer. Repli ou réalité. Je saisis l’occasion pour partir. Il faut que je la sorte de cette situation. Mais je le fait pour moi ou pour elle. En partant, elle renverse et brise le verre de Gin fizz à moitié plein. Désormais totalement vide.
Le retour est silencieux. Nous faisons l’amour, ou du moins quelque chose qui s’y apparente. Le diagnostique de la soirée est définitif. C’est fini. Elle ne va pas comprendre. C’est un boulet en puissance, même si elle ne s’est pas encore dévoilée. Je m’en rends compte ce soir. Il faut que je me nettoie les yeux. La nuit n’est qu’interrogation sur mes choix. Ai-je le droit de juger cette personne. Bien sur, pour moi. Il faut que je la largue au plus vite. Elle va pleurer. Et alors. Comment m’y prendre. Une lettre, bien lâche, histoire qu’elle me haïsse et me laisse tranquille. En face, elle risque de vouloir résister, s’accrocher. De plus, je ne peux pas lui dire que je la laisse tomber parce qu’elle me parait trop stupide. Le meurtre serait plus simple, ne laissant pas le poids d’une discussion pesante le temps de s’installer. Par contre, je n’ai pas envie de risquer la prison pour elle. Il y a les sms, une variante de la lettre en moins respectueux. Où le pire de tout, le silence. Par contre, elle risque la aussi de s’accrocher, de me poursuivre et de me gaver à un point incommensurable en cherchant à comprendre. Je le sais bien, je réagirais peut être comme ça. Bon je vais me rabattre sur la franchise par téléphone. Ni trop salaud, ni trop gentil. La dose nécessaire de cruauté pour augmenter la déception.
Le réveil est normal pour un couple. Anormal pour de futurs ex. On est rhabillé. On prend un petit café. Elle me dit que mes copains ne sont pas géniaux et se demande comment je peux fréquenter des types aussi bas d’esprit. Elle n’est pas prête à les revoir. Je prends mes affaires et lui dit que j’ai fait mon choix, adieu.
Je sors de l’immeuble le sourire aux lèvres. Le hasard fait bien les choses et à le don de me sortir de situations difficiles. Ma lâcheté n’a de limite que la chance.